• 22 JUIN 15
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    Perturbateurs endocriniens : quels risques ?

    Perturbateurs endocriniens : quels risques ?

    La notion d’exposition est essentielle

    Selon le rapport de janvier 2014 de la Haute Autorité Européenne de Sécurité Sanitaire sur les risques du bisphénol A, chaque produit est déterminé en fonction de sa dose toxique ou de sa non toxicité. Si une très faible dose est susceptible de provoquer des troubles sur des populations vulnérables, comme une femme enceinte, un fœtus ou un nourrisson, la seule solution envisageable est-elle l’interdiction du produit ? Il faut protéger ces populations vulnérables sans attendre et avec un maximum de connaissances, sans outrance ni panique. Quel est le bénéfice d’une interdiction globale des produits par rapport à l’ensemble de la population ? Cela peut-il même détourner de l’objectif clef, la protection des populations vulnérables ? Mais comment éviter autrement l’exposition des populations sensibles de substances utilisées dans des produits de grande consommation ? Il faut donc harmoniser les méthodologies d’évaluation et de gestion des produits chimiques. Car il existe des incertitudes par exemple sur la capacité prédictive réelle des essais in vivo. Les méthodes sont validées mais sont-elles vraiment efficaces ? Couvrent-elles toutes les perturbations endocriniennes potentielles ? Certains axes endocriniens ne sont pas pris en compte, comme les effets temporaires de la perturbation endocrinienne. Les essais in vivo ne prennent pas en compte le vieillissement prématuré de la fonction reproductive chez l’homme.

    Mettre à jour les méthodes

    La priorité de l’OCDE, l’Organisation de Coopération et de Développement Économique, est de mettre à jour des méthodes existantes pour inclure les effets des perturbateurs endocriniens. Car si les connaissances existent, elles ne sont pas assez structurées pour comprendre les mécanismes d’action qui amènent à des pathologies. Il existe beaucoup de tests in vitro validés par l’OCDE, des tests qui ciblent des mécanismes d’action très précis sur le fonctionnement de perturbateurs endocriniens mais pas assez d’approches physiologiques.

    Pour certains chercheurs, les tests ex vivo, intermédiaires entre in vitro et in vivo peuvent être intéressants pour une approche globale. L’approche in silico permet de réaliser des essais au moyen de calculs complexes informatisés ou de modèles informatiques. Mais la modélisation ne remplace pas le laboratoire. L’outil in silico permet de faire du tri. L’information in silico va de pair avec la biologie. Mais il faut que le modèle in silico soit bon. Or, l’analyse de la littérature prouve que nombre de ces modèles ne sont pas à la hauteur de l’enjeu. Les tests in silico ne peuvent en aucun cas être robustes s’ils ne sont pas couplés aux analyses biologiques.

    La dose fait le poison

    Pendant une certaine période, on a pensé (et cela reste vrai), que « la dose fait le poison » et que la relation entre la toxicité et la dose est relativement monotone, linéaire. Concernant les perturbateurs endocriniens, certaines substances ne suivent pas les lois standards d’effets de seuil, ni les effets de proportionnalités avec la dose. Pour ces substances, mêmes les doses faibles peuvent provoquer des effets délétères. Pour les identifier, il faut donc organiser des batteries de tests : cumuler des aspects in vitro, in silico pour les aspects mécanistiques et des tests in vivo qui ont vocation à révéler des effets à certains niveaux de dose. Une fois ces tests réalisés, nous sommes en mesure d’identifier un effet sur le système endocrinien et d’apprécier également ces effets au niveau du cycle de la vie et donc d’identifier un danger voire d’apprécier le risque. Car danger n’est pas risque. Le risque naît de deux éléments : l’identification du danger potentiel d’une substance et l’évaluation de l’exposition de cette substance.

    C’est donc la complémentarité des approches (in-silico, in-vitro, ex-vivo) qu’il faut viser afin d’obtenir une vision intégrative et systémique du problème. Il sera important de susciter des collaborations entre PME innovantes et recherche académique et industriels pour faire émerger des solutions nouvelles.

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